J'ai eu l'immense plaisir d'animer un atelier Ecriture et théâtre sur le thème de l'identité avec Alain Khouani au centre pénitentiaire de Meaux à la demande de l'équipe du groupe APRES/ARES en charge de l'insertion de détenus en fin de peine. Quelle émotion de voir encore une fois que la pratique de l'écriture de fiction ouvre des portes insoupçonnées. Puiser dans son imaginaire pour se redécouvrir et se relier au monde. Cet atelier démontre la contribution de la pratique de l'écriture de fiction dans le processus de réinsertion de personnes fragilisées.
Découvrez mon témoignage publié par APRES/ARES, notre partenaire au centre pénitentaire de Meaux
"Dans cet atelier, nous allons explorer des terres nouvelles sur lesquelles vous déambulerez en toute liberté". Le mot est lâché. je saisis l'ironie de la situation. Leurs regards sont polis, perplexes. Je perçois chez certains une lueur d'amusement. Le mot continue de résonner dans la salle. J'ai l'impression d'être un saumon qui remonte la rivière à contre-courant. Je poursuis : " Chacun d'entre vous a sa propre écriture, unique, singulière, comme une empreinte digitale, aucune n'est pareille, elle vous appartient, elle vous définit, elle vous éclaire. " Le silence qui emplit la salle se charge de questions muettes. "L'écriture ouvre des espaces infinis, préparez-vous, nous allons voyager, nous mettre en mouvement, car on écrit aussi avec le corps. "
Au fil des ateliers le miracle se produit. Nous ne sommes plus à Meaux, au centre pénitentiaire de Meaux, dans une des salles de ce centre, nous sommes au Mali du temps de l'apogée de l'empire Mandingue au XIVième siècle, nous sommes au Ghana au milieu du XVIIIième siècle en pleine traite négrière, nous sommes à New York juste avant la crise de 1929, nous sommes dans un petit village de la Creuse des années 30, nous sommes au Japon du temps des samouraïs. Emportés par le télescopage des lieux et des époques, nous déambulons dans un espace sans limite qui ne cesse de s'agrandir.
Lorsque nous abordons les ancêtres, une nouvelle porte s'ouvre, plus intérieure celle-ci. Un des participants, qui depuis le début reste en retrait, vient me voir et me dit "Oh non ! Pas les ancêtres ! ". Il remplit pourtant l'arbre généalogique très particulier que je leur remets - pas de nom ni de date, seulement des qualités, des métiers, des rêves - mais refuse de lire. Je me souviendrai de ce moment où il est venu vers moi en larmes pour me remercier. La séance suivante. Il écrit un texte personnel, très beau. Il y a des portes qui s'ouvrent et qui ne se referment pas (...). Florence Miroux
A VENIR
Prochaine intervention du Laboratoire des écritures au centre pénitentiaire de Meaux dans le cadre du programme d'insertation de détenus en fin de peine du 16 septembre au 23 octobre 2024 avec Florence Miroux, Jonathan Hostier et Christophe ChêneCailleteau.
PROGRAMME
Un cycle de formation à l’écriture de fiction sur le thème de l’identité associant écriture et théâtre sous la forme de 12 ateliers de 3h sur un rythme bi-hebdomadaire les lundis et les mercredis.
Le choix du thème de l’identité concoure à l’objectif final de réinsertion visé par le parcours de formation organisé par le groupe Après/Groupe Arès.
Au travers de la fiction, par les voies du langage et du corps, les stagiaires peuvent librement et de manière ludique entreprendre un travail de reconnexion de soi avec le monde et avec l’Autre durant le module 1 et plonger dans leurs racines lors du module 2 au travers des personnages qu’ils sont amenés à créer. Le module 3 prépare les stagiaires à lire une partie de leur production devant un public.
Chaque module est l’occasion pour les participants de raconter une histoire de bout en bout. En explorant différentes trajectoires pour leurs personnages, les participants s’autorisent à se projeter eux-aussi dans un avenir à reconstruire.
La forme de l’atelier en petit groupe (9 personnes maximum) permet de nouveaux modes de coopération basés sur l’écoute et l’échange intégrant la multiplicité des regards.
Comments